Chronique

Lettre ouverte à Mme Khaola Taleb-Ibrahimi

Vous avez donné, Madame, le jeudi 20/06/2013 une interview au journaliste d’el Watan, Hacen Ouali, qui nous a habitué à moins de frilosité.

Il vous présente comme « figure universitaire », obnubilé qu’il est par votre « pedigree » de fille ? nièce ? de Ahmed Taleb-Ibrahimi.

Vous dites :

« …C’est la nature du système politique mis en place depuis 1962 et qui a construit son pouvoir sur le mépris total de la société et de la population… ».

Voilà des paroles sensées ! le sens critique qui doit être l’outil de l’intellectuelle que vous êtes aurait dû vous amener à mettre en bonne place le rôle négatif joué par votre parent Ahmed Taleb-Ibrahimi, grâce à la situation duquel vous avez bénéficié d’une bonne éducation (dans son livre, une Algérienne debout, Khalida Messaoudi qui, s’est arrêtée à la licence de maths a quelques phrases bien senties à votre endroit) et des privilèges dus à votre proximité avec ce pouvoir depuis 1962. Non que Ahmed Taleb-Ibrahimi c’est vous, mais je reviendrai sur les continuités entre Ahmed Taleb-Ibrahimi et vous.

Ahmed Taleb-Ibrahimi est au cœur du système depuis 1962 : un moment en retrait entre 1962 et 1965, dès juin 1965 et à la faveur du 3e coup d’État (après celui contre le GPRA et celui de l’été 1962) il s’installe durablement au cœur du système sous la protection de Boukharrouba (alias Boumediene) et œuvrera de toutes ses forces à instiller ce mépris envers la population dans le domaine le plus sensible qui soit : les nourritures intellectuelles : la culture, l’enseignement. Où il occupa les postes de ministre menant son œuvre de destruction de l’intelligence algérienne.

Vous dites « … pourquoi en sommes-nous arrivés là ?… » eh bien votre parent Ahmed Taleb-Ibrahimi en connait surement la réponse : le ver était dans le fruit depuis 1962, Ahmed Taleb-Ibrahimi a eu sa part de responsabilité dans le façonnage de l’école algérienne qui est un gouffre et de la culture algérienne que Ahmed Taleb-Ibrahimi méprisait car trop populaire, pas assez orientale, pas assez élitiste : son épouse libanaise (ou syrienne, moyen-orientale en tout cas) faisait la pluie et le beau temps et décidait de ce que les Algériens « doivent » voir à leur télévision « nationale ».

Ahmed Taleb-Ibrahimi l’apparatchik islamo-brejnévien a commencé sa chasse aux sorcières bien plus tôt : à la sortie de La Colline oubliée,en 1952, il agonira Mammeri d’accusations dans un article publié dans Le jeune musulman. Il récidivera plus tard en lui interdisant une conférence à Constantine !

Lors du festival panafricain des arts en 1969, il séquestrera en garde-chiourme Taos Amrouche à l’hôtel Saint Georges et lui interdira de chanter, il est vrai qu’elle présente des tares impardonnables : Kabyle et chrétienne.

Le fils du cheikh El Ibrahimi est dans la continuité de son père : celui-ci a demandé aux autorités coloniales ! de fermer la radio kabyle en 1948, faisant des quolibets sur la langue kabyle qui lui écorche les oreilles, disant : Eloughatou El arabiya La takbalou tharatan ! (La langue arabe ne peut accepter une coépouse !) et que les Kabyles ne seraient des Algériens « parfaits » que lorsqu’ils cesseraient de parler kabyle ! un ethnocide et linguicide programmés !

Il participera activement à la falsification de l’histoire, en effaçant les épisodes les plus glorieux auxquels ni lui, ni son père, ni Boukharrouba n’ont participé ! il fera la part belle à la secte dont faisait partie son père, les ouléma, précurseurs de l’islamisme, qui n’ont rejoint le combat indépendantiste qu’en trainant les pieds, occultant les figures favorables au pluralisme comme le cheikh M’barek El Milli, le cheikh El Okbi…

A l’université, il fit la chasse aux chercheurs d’expression française, qui eux « … travaillant sur la compréhension de la société… » comme vous dites furent acculés à l’exil, et les meilleurs étudiants refusèrent de s’inscrire en sciences sociales, arabisées et idéologisées, loin de toute scientificité: il les remplaça par une faune de pseudo-intellectuels acquis à l’idéologie baathiste puis islamiste dont le seul bagage est la lougha arabiya (la langue arabe) et leur appétit de domination sur le peuple en lui imposant la fousha. Il appuiera jusqu’à son dernier souffle l’inculte Boukharrouba dans son entreprise qui consiste à faire de l’Algérie une province reculée du Moyen-Orient.

Assoiffé de pouvoir (Malek Bennabi, dans ses mémoires, le qualifie de petit dictateur prétentieux), il passe, en 1992 sans coup férir du « socialisme » à la sauce Boukharrouba, à l’islamisme revanchard à travers son parti-couverture du FIS, dénommé WAFA, pour achever son œuvre de destruction.

J’arrête ici, l’article aura une suite.

Kahina Imadghassen

Lire la deuxième partie de la lettre ouverte

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